Le Transfert des compétences et des ressources aux communes pour une décentralisation véritable !

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LES FONDEMENTS DU TRANSFERT DES COMPETENCES ET DES RESSOURCES

C’est dans l’exposé des motifs du décret du 25 mars 1852 qui renforce les pouvoirs des préfets en France qu’on trouve cette phrase qui montre bien la nécessité de partager les compétences et les ressources entre le pouvoir central et les collectivités territoriales : « on peut gouverner de loin mais on n’administre que de près ». La célèbre citation d’Odilon Barrot, grand homme politique français du XIX siècle : « c’est toujours le même marteau qui frappe ; seulement (avec la déconcentration/décentralisation) on a raccourci le manche », renforce cette évidence. Le but visé est d’accroître la qualité et l’accessibilité des services aux populations en les fournissant au plus près de leur cadre de vie.

Le principe de subsidiarité

La décentralisation sans transfert des compétences et des ressources est une centralisation déguisée, aux antipodes du principe de subsidiarité qui régit la mise en place et la mise en œuvre de la décentralisation.  Pour mémoire, le principe de subsidiarité est le principe selon lequel une responsabilité doit être assumée par le niveau dautorité publique le plus compétent. C’est donc, pour l’action publique, la recherche du niveau le plus pertinent, le plus proche et le plus contrôlé par les citoyens. Il conduit à ne pas faire à un échelon plus élevé ce qui peut être fait avec plus d’efficacité à un échelon plus bas. Le niveau supérieur n’intervient que si le problème excède les capacités du niveau inférieur. Il s’agit du principe de suppléance dont l’origine remonte à la doctrine sociale de l’Eglise catholique, selon le dictionnaire numérique Wikipédia. En matière de décentralisation, le principe de subsidiarité conduit l’Etat à déléguer certaines de ses compétences aux collectivités territoriales lorsqu’il considère qu’elles sont plus à même de les assumer, compte tenu de leur proximité avec les citoyens.

De façon empirique, Mme Luísa Dias Diogo, première femme Premier Ministre du Mozambique exprime la conviction suivante, disponible sur la page d’accueil du Fonds des Nations Unies pour l’Equipement : « notre expérience de la décentralisation nous a ouvert de nouvelles perspectives pour traiter le problème de la pauvreté. Nous avons pu constater que les efforts de développement sont plus efficaces s’ils sont planifiés et réalisés en partenariat avec les communautés locales. » De même, le Parlement européen, dans un rapport sur les collectivités locales et la coopération au développement (2006/2235(INI)), reconnait que « l’implication des autorités locales dans les politiques de développement est indispensable pour atteindre les OMD et pour assurer la bonne gouvernance.» Koffi Annan, ancien secrétaire général des nations unies, lors du Sommet du Millénaire en 2005, ne dira pas le contraire : »comment pouvons-nous espérer atteindre les OMD sans accomplir de progrès dans des domaines comme l’éducation, la lutte contre la faim, la santé, l’accès à l’eau, les conditions sanitaires et l’égalité des genres? Les villes et les gouvernements locaux ont un rôle crucial à jouer dans tous ces domaines. Si nos Objectifs sont mondiaux, c’est au niveau local qu’ils peuvent être le plus efficaces ».

Les exigences légales

A toutes ces réflexions de haut niveau, s’ajoutent les dispositions légales. La Loi N° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin (notamment de l’article 82 à l’article 108), renforcée par la Loi N° 98-005 du 15 janvier 1999 relative aux communes à statut particulier, met à la charge des collectivités locales, l’exercice de nombreuses compétences qui touchent essentiellement aux conditions de vie des populations à travers des services de base que la commune doit leur fournir. La plupart de ces articles, une fois la compétence énumérée, dispose : « … A cet effet, l’Etat lui transfère les ressources nécessaires ». Cette phrase est revenue dans plusieurs dispositions de la loi, pour rappeler à l’Etat central (le gouvernement) que la décentralisation ne signifie pas que le pouvoir central se débarrasse des missions et conserve les ressources. Ce qui serait en contradiction avec les exigences de bonne gouvernance.

ETAT DES LIEUX DU TRANSFERT DES COMPETENCES ET DES RESSOURCES AUX COMMUNES.

Depuis huit ans que la décentralisation est entrée dans sa phase active au Bénin, les communes qui ont la charge des principaux services de base aux populations, n’ont géré qu’une infirme partie des ressources publiques. Par exemple, en 2008, selon les statistiques budgétaires compilées par le journal Le Municipal à partir des documents de la CONAFIL (Commission Nationale des Finances Locales), sur un budget général de l’Etat de plus de 1000 milliards annoncés, les communes n’ont eu pour ressources financières que 35 389 181 666 de nos francs, soit 3,53% des ressources annoncées de l’Etat. Si l’on enlève les trois communes à statut particulier que sont Cotonou, Parakou et Porto-Novo, le montant total du budget des communes s’élève à 19 509 997 622, ce qui représente 1,95 % du budget général de l’Etat.

 

Pour comprendre, aisément, la situation des communes béninoises en matière de compétences et de ressources, il suffit de se référer à trois périodes. L’année 2003 avec la mise en place des communes, l’année 2008 avec la création du Fonds d’Appui au Développement des Communes (FADeC) et 2010, année de la phase pilote du transfert des compétences et des ressources, conformément à l’arrêté interministériel n°005/MRAI/MDGLAAT/MFE/DC/SGM/DPRA/SA du 17 février 2009.

La situation des communes en 2003

  • En ce qui concerne les compétences. Entre les adeptes du centralisme d’Etat et la théorie de transfert immédiat des compétences et des ressources, le pouvoir central, à l’instar d’autres gouvernements africains, a opté pour le « transfert en bloc aménagé par domaine de compétences ». C’est du moins ce qu’il faut retenir du conseil des ministres du 03 novembre 2004. C’est ce que le gouvernement du Faso a appelé  la règle de progressivité dans le Décret N° 2006-209 portant transfert des compétences et des ressources aux communes urbaines, dans les domaines du préscolaire, de l’enseignement primaire, de la santé, de la culture, de la jeunesse, des sports et des loisirs : « Le transfert des compétences de l’Etat aux collectivités territoriales est régi par la règle de la progressivité ». Ainsi donc, toutes les compétences et par conséquent les ressources, ne seront pas transférées aux communes au même moment. Selon le gouvernement, ce mode de transfert vise à sauvegarder le principe de la continuité du service public dans toutes les communes. Un transfert immédiat et rapide des compétences pourrait dépasser les capacités de gestion des communes et entraver la continuité et la qualité du service public. De façon habile, l’Etat a fait une catégorisation des compétences. Celles dont l’exercice est jugé facile pour les collectivités territoriales naissantes et qui sont immédiatement transférées (le développement local, la préparation et le vote du budget communal ou municipal, l’élaboration du plan de développement local, les déchets solides et liquides, l’assainissement urbain, la gestion des embarcadères et des marchés à l’exception des marchés gérés par la Société de gestion des marchés autonomes…) et les compétences jugées plus difficiles à exercer par les communes. Le transfert de ces dernières est différé. Il s’agit, entre autres de la construction des écoles maternelles et primaires, de la construction des centres de santé, de la fourniture et la distribution de l’eau potable, de la construction, de l’entretien des pistes rurales et ouvrages d’art… Une période de transition est prévue pour rendre les communes aptes à les assumer.

  • L’état des ressources communales en 2003. De manière unanime, il est reconnu que le transfert des ressources humaines est un préalable pour la réussite du transfert des compétences et des ressources. Or, en 2003, les Communes ont hérité des sous-préfectures et circonscriptions urbaines d’environ 4.000 agents, constitués en grande majorité d’agents d’exécution (94%) et d’un nombre très insuffisant de cadres de conception et d’encadrement (6%). Pour ce qui concerne les ressources matérielles, les Communes ont aussi hérité des patrimoines mobiliers et immobiliers des circonscriptions administratives. Sur le plan financier, les recettes des communes se chiffrent à 15.249.102.816 F CFA dont 6.741.919.000 F CFA de ressources allouées et déclinées comme suit, selon une statistique publiée en octobre 2011 par le ministère en charge de la décentralisation :
    • Subvention Etat aux charges salariales des collectivités locales déshéritées : 277.450.000 de francs CFA ;
    • Subvention de Substitution à la Taxe Civique : 450.000.000 de francs CFA ;
    • Fonds de Solidarité Intercommunal : 600.000.000 de francs CFA ;
    • Reversement de la Taxe sur la Valeur Ajoutée : 2.239.645.453 de francs CFA ;
    • Reversement de la Taxe de Voirie : 3.174.823.547 de francs CFA.

 

Le transfert des ressources entre 2008 et 2010

Selon le point sur les collectivités locales au Bénin de juin 2009,  préparé par le Groupe Technique Décentralisation-Déconcentration et Aménagement du Territoire et validé lors de la Revue sectorielle conjointe Gouvernement-bailleurs d’avril 2009, les transferts de ressources au bénéfice des collectivités locales ont connu une hausse. C’est ce qui ressort du tableau suivant qui tient compte des données publiées par le ministère en charge de la décentralisation en octobre 2011:

Transferts de l’Etat vers les communes de 2006 à 2008, année de création du FADeC

2006 2007 2008
Fonctionnement Investissement Fonctionnement Investissement Fonctionnement Investissement
5 040 737 000 1 200 000 000 3 070 737 000 1 400 000 000 2 534 737 000 5 436 000 000
Total : 6 240  737 000 Total : 4 470  737 000 Total : 7 970 737 000

 

Le tableau présente l’évolution du transfert des ressources de l’Etat vers les communes avec une nette amélioration en 2008. Ce qui montre que la création du FADeC a contribué à l’accélération du transfert des ressources de l’Etat vers les communes. On est passé de 4.470.737.000 de francs en 2007  à 7.970.737.000 en 2008. Or, en 2003, selon une statistique publiée par le ministère en charge de la décentralisation en octobre 2011, le transfert des ressources de l’Etat vers les communes s’élevait à 6.741.919.000 de francs CFA. Ce transfert va connaitre une tendance baissière en 2007 avec 4.470.737.000 de francs CFA.  Avec la création du FADeC, le transfert de l’Etat vers les communes a quasiment doublé entre 2007 et 2008.

La phase pilote

L’accroissement du volume du transfert des ressources aux communes va se confirmer avec la phase pilote du transfert des compétences et des ressources aux communes. Cinq ministères sectoriels sont ciblés par cette phase pilote, selon le Rapport général des ateliers d’élaboration des plans de transfert des compétences et des ressources aux communes du MRAI du 04 avril 2009. Pour un montant total de 11.627.169.400 de nos francs à transférer aux communes. Il s’agit :

  • du Ministère des Enseignements Maternel et Primaire (MEMP). Le MEMP a fait des efforts en matière de transfert des compétences et ressources aux Communes dans les domaines de l’équipement et de l’entretien des infrastructures scolaires. Mais le rôle d’assistance conseil de ses structures déconcentrées reste à renforcer. Dans le domaine de la construction, le transfert  est différé du côté de l’Etat, alors que, grâce à la coopération décentralisée et l’appui direct de certains partenaires, des communes exercent cette compétence.
  • du Ministère de l’Enseignement Secondaire, de la Formation Technique et Professionnelle (MESFTP). Au niveau de ce ministère, le transfert des ressources affectées aux Communes à statut particulier est différé.
  • du Ministère en charge de l’Eau et de l’Energie, qui a fait un effort en matière de transfert des compétences aux Communes dans les domaines de l’eau et de l’énergie en milieu rural et a trouvé les voies et moyens de transférer également les ressources subséquentes malgré l’absence d’une procédure nationale en la matière. On aurait pu parler de transfert total si la question de la maîtrise d’ouvrage était réglée. Par contre, dans les domaines de fourniture d’eau en milieu urbain et périurbain et d’éclairage public, les compétences sont exercées en partenariat du fait de l’enchevêtrement des installations qui constituent par ailleurs des investissements lourds pour les Communes.
  • du Ministère de la Santé. Le Ministère de la Santé a effectué un effort appréciable pour transférer les compétences et des ressources aux Communes notamment dans le domaine de la construction et / ou de la réfection des infrastructures. En effet, les Communes sont les maîtres d’ouvrage et les Directions Départementales de la Santé assurent l’assistance conseil. Dans le domaine de l’équipement, il est observé une approche progressive de transfert en raison de la spécificité et du caractère sensible du matériel médico-technique.
  • du Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche qui a mis en place des structures déconcentrées pouvant accompagner réellement le développement du secteur. En ce qui concerne la construction, l’équipement, l’entretien et la gestion des abattoirs, la complexité de l’ouvrage, le coût élevé de l’investissement et l’insuffisance d’information des élus locaux sur l’importance et la nécessité de ces infrastructures expliqueraient en partie le statut quo.

Les prévisions de ressources de ces ministères qui devraient abonder le FADeC de même que la dotation de l’Etat pour fonctionnement et investissement FADeC sont résumées dans le tableau suivant :

RESSOURCES DU FADeC EN 2010
Fonctionnement FADeC Investissement

FADeC

DOTATIONS AFFECTEES
2 500 000 000 11 627169 400

 

Ministère des Enseignements Maternel et Primaire Ministère Enseignement

Secondaire

Ministère de la Santé

 

Ministère de l’Eau et de l’Energie

 

7 994 948 000 478 984 000 2 784 000 000 369 237 400
TOTAL DES RESSOURCES PREVUES AU FADEC 2010 : 14 127 169 400

 

Ces prévisions ont été revues à la baisse dans le document «état des lieux et perspectives sur le transfert des compétences et des ressources aux communes», publiée par le ministère en charge de la décentralisation en octobre 2011 et s’établissent à 7.599.937.000 de nos francs. L’évaluation du niveau effectif du transfert de ces ressources aux communes sera un important indicateur de la volonté politique du gouvernement. Malheureusement, les premières indications que nous avons reçues des services financiers des mairies ne confirment pas des transferts de cette ampleur y compris pour le compte de l’exercice 2011 pour lequel le FADeC a la prévision suivante :

ANNEE DOTATIONS FONCTIONNEMENT DOTATIONS INVESTISSEMENT TOTAL
2011 2 534 737 000 9 406 800 000 11 941 537 000

LES CONDITIONS PROPICES AU TRANSFERT DES COMPETENCES ET DES RESSOURCES

Il ne s’agit pas de préalables, mais d’un environnement à mettre en place pour que le transfert des compétences et des ressources comble les attentes des populations et de l’Etat qui a opéré la décentralisation. Les propositions concernent aussi bien le gouvernement central que les collectivités locales.

En ce qui concerne le pouvoir central :

  • Renforcement du cadre de coordination de la mise en œuvre de la décentralisation. La création d’un ministère uniquement chargé des questions de décentralisation a été une avancée majeure dans le processus de décentralisation au Bénin. De plus, l’implication du Ministère de la Reforme Administrative et Institutionnelle et du Premier Ministre, alors ministre d’Etat chargé du Développement a permis d’avancer dans le transfert des compétences et des ressources aux communes. Cependant, il me paraît nécessaire de disposer d’un cadre de pilotage du processus présidé par le Chef de l’Etat en personne, avec le Premier Ministre comme chef de file. Le ministère de la décentralisation, cheville ouvrière de la réforme, animera le secrétariat permanent. Le niveau élevé de cette structure obligera les ministères sectoriels à se plier à ses directives. C’est pourquoi, je plaide pour la création d’un Conseil National de la Décentralisation et de la Gouvernance Locale ouvert aux élus locaux, aux ministères sectoriels concernés par la réforme, aux parlementaires, à la société civile et au secteur privé (notamment la Chambre de Commerce et d’Industrie, le Conseil National du Patronat, le Conseil des Investisseurs Privés, …). Ce Conseil devrait avoir pour mission d’évaluer à un niveau stratégique, la mise en œuvre de la Politique Nationale de Décentralisation et de Déconcentration (PONADEC) pour assurer le processus de transfert des compétences et des ressources et donner les directives pour son amélioration. Il évaluera également l’évolution de la gouvernance locale dans les communes du pays. Dans le cadre de l’élaboration et de la mise en œuvre du Budget général de l’Etat, le Conseil National de la Décentralisation et de la Gouvernance Locale s’assure que l’avant projet du budget général de l’Etat est en conformité avec le processus de transfert des compétences et des ressources aux communes.
  • Harmonisation de la planification des investissements des ministères sectoriels, du PIP avec les PDC des collectivités Locales. Ce qui permet une synergie d’action entre les ministères sectoriels et les communes, sans oublier la garantie de la qualité des dépenses publiques et la mise en place des infrastructures conformes aux attentes des populations et répondant aux enjeux de développement durable de chaque localité. Le rôle du préfet en tant que coordinateur des actions du gouvernement au niveau départemental devra être renforcé. Aussi, l’audace d’opérationnaliser les 12 préfectures actuelles est nécessaire. Les 6 préfectures n’ayant pas été jusque là rendu fonctionnelles, quoiqu’elles existent formellement, devront être créées, dotées de personnels adéquats et de ressources conséquentes pour assurer la mission qui leur est dévolue.
  • Redéploiement du personnel de l’Etat dans les Préfectures et dans les communes. Il paraît incohérent et coûteux pour le pays de transférer des compétences des ministères sectoriels vers les communes, tout en augmentant les ressources humaines de ces ministères alors qu’un besoin criard en personnel qualifié se fait sentir dans les préfectures et les mairies. Une bonne partie des cadres chargés d’exécuter ces compétences devrait être redéployée vers les administrations départementales et communales, en attendant le vote de la loi sur la fonction publique territoriale. Ce redéploiement devrait également permettre de renforcer les capacités d’intervention des structures déconcentrées qui devraient accompagner le Préfet dans l’assistance conseil aux Communes.
  • Renforcement du FADeC comme instrument national du transfert des Ressources aux Communes. Créé par décret N° 2008-276 du 19 Mai 2008, le FADeC est un mécanisme national de financement des Communes. Il est destiné au transfert de ressources au profit des Communes. C’est d’ailleurs sa vocation (mobiliser les ressources destinées au développement de l’offre des communes et des structures intercommunales, concourir à la correction des déséquilibres entre les communes par un système de péréquation). La pertinence de cet outil mérite que le gouvernement lui accorde toute la place qu’il faut dans le dispositif de transfert des ressources aux communes.

En ce qui concerne les Collectivités Locales :

  • Mise en place d’un dispositif réel de démocratie participative intégrant le budget participatif. La décentralisation suppose une gestion de proximité basée sur l’implication des citoyens dans les prises de décisions et dans le contrôle de leur mise en œuvre. A cet effet, le budget participatif est un puissant instrument de gestion participative et transparente des ressources publiques communales. Il permet aux citoyens de participer au choix des investissements à faire dans la commune et d’exiger, au besoin, une réduction des dépenses de fonctionnement. Il permet l’apprentissage de la démocratie et devient un mécanisme de pression populaire pour le transfert des compétences et des ressources.
  • Promotion des outils de bonne gouvernance et de gestion transparente des ressources communales. A cet effet, les lois sur la décentralisation ont prévu des mécanismes de participation et de transparence comme la publication du budget de la commune. Dans d’autres pays, les maires ont innové en :
    • déclarant leurs biens au début et à la fin de leur mandat ;
    • publiant les dépenses trimestrielles de la mairie sur des affiches et par voie de presse.

Dans tous les cas, il revient au maire et son conseil communal ou municipal d’assurer la transparence dans la gestion des ressources matérielles et financières de la commune. Il est heureux qu’une Charte sur la gouvernance locale soit disponible dans notre pays. Les élus devront la ratifier et s’engager pour une orthodoxie de gestion qui permette d’assurer la transparence et la reddition de compte dans la gestion des affaires publiques locales.

  • Maîtrise des textes de la décentralisation et des procédures par les élus locaux. Le pré-requis pour tout élu local dans la promotion du développement et de la démocratie au niveau de sa commune repose sur la connaissance des textes de loi et des procédures sur la décentralisation. Ce qui n’est pas encore le cas de tous les élus locaux.
  • Amélioration des dispositifs de collaboration entre les communes et l’Etat. Malgré la décentralisation et ses corollaires d’autonomie locale, l’Etat et les collectivités locales sont condamnés à œuvrer pour le développement du pays. Il importe donc que les deux parties puissent entretenir de bonnes relations qui ne devraient pas être conditionnées par les appartenances politiques et partisanes.
  • Maîtrise du mécanisme du FADeC par les maires. En plus des formations et des sensibilisations sur le FADeC, les élus locaux doivent eux-mêmes entreprendre de connaître et de maîtriser les procédures du Fonds. C’est l’instrument privilégié dont ils disposent pour financer leur développement. L’engagement des élus à une bonne utilisation des fonds FADeC doit relever des bonnes pratiques de gouvernance au niveau local ; ce qui doit transparaître dans l’amélioration des conditions de vie des populations.
  • Renforcement des capacités managériales des communes. Dans ce cadre, les maires doivent promouvoir une séparation des postes politiques des postes administratifs et techniques. Il s’agit également d’initier des programmes de renforcement des capacités du personnel communal. L’avènement prochain d’un Centre de Formation pour l’Administration Locale (CeFAL) sous le pilotage du MDGLAAT présente de bonnes perspectives en la matière.

La décentralisation béninoise, comme tout processus social, connaît des succès et des échecs. Après huit années de mise en œuvre, on peut se réjouir de la dynamique locale naissante que l’Etat se doit d’accompagner avec un transfert effectif des compétences et des ressources aux collectivités locales. Dans le même temps, il est du devoir de tous les acteurs de la décentralisation de veiller à une bonne gestion des ressources transférées dans les communes. Le point de satisfaction qui se dégage malgré tout, est que tous les acteurs reconnaissent les communes comme le cadre par excellence de l’exercice de la démocratie et de promotion du développement. De son côté, le gouvernement demeure le chef d’orchestre de toutes ces partitions locales au profit du développement national. Les populations, la société civile et les médias apportent diversement leur pierre à l’édification d’une décentralisation, facteur de développement. Aujourd’hui, il y a une belle unanimité autour de la nécessité de poursuivre et de renforcer le processus. Comme l’a si bien souligné Anders Rasmussen, ancien ambassadeur du Danemark près le Bénin, lors du forum d’évaluation des trois premières années de la décentralisation organisé par Le Municipal, « Les communes sont devenues incontournables dans la promotion du développement local et la décentralisation apparaît comme un processus irréversible aux yeux de bien des citoyens ». Si c’est le cas, nous devons tous nous mobiliser pour le succès de la décentralisation. Cela passe nécessairement par le transfert des compétences et des ressources aux communes, avec des mesures d’accompagnement comme le redéploiement du personnel de l’administration centrale vers les préfectures et les mairies.

 

Par Franck S. KINNINVO

Expert en Communication et en Décentralisation

Directeur Exécutif de la Fondation Le Municipal

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