Un premier bilan de la Réforme structurelle du secteur de la décentralisation !

20 ans de décentralisation au Bénin

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20 ans de décentralisation au Bénin

Un premier bilan de la Réforme structurelle du secteur de la décentralisation !

Une réforme qui ne laisse personne indifférente. Alors que certains acteurs l’acclament, d’autres y voient un recul de la décentralisation au Bénin. Une chose est certaine, la Réforme structurelle du secteur de la décentralisation continue son chemin, fait de grands changements dans le fonctionnement des communes du Bénin.

« Avant, lorsque mon véhicule rentre dans l’enceinte de la mairie, tous les agents dehors accouraient pour me saluer. Aujourd’hui, pour ces mêmes agents, je ne représente plus rien et je suis devenu comme un étranger dans l’administration dont je suis pourtant la première autorité ». Ces récents propos d’un maire en dit long sur le changement radical opéré par la réforme dans la vie des communes béninoises. Mais d’un autre côté, cette réforme permet aux communes d’avoir des ressources et de pouvoir impulser un vrai développement à la base, quête demeurée infructueuse depuis 2003.

A l’étranger, la réforme ne manque pas d’admirateur. L’un des tout premiers admirateurs de la Réforme structurelle du secteur de la décentralisation est le Président du Conseil des Collectivités Territoriales de l’UEMOA, Ministre et maire de Treichville en Côte d’Ivoire. Selon le très expérimenté et charismatique Albert François AMICHIA, le Bénin, bien qu’étant l’un des tout derniers pays à se lancer dans la municipalisation de la vie publique, vient d’innover en mettant d’importantes ressources à la disposition des collectivités locales.

Une réforme qui donne d’importants moyens aux communes.

L’un des points forts de la Réforme structurelle du secteur de la décentralisation est la mobilisation d’importantes ressources humaines au profit des communes. Il s’agit de plus de cinq cent (500) cadres à déployer à terme, répondant à des profils spécifiques pour occuper les postes suivants dans l’administration communale : secrétaires exécutifs des mairies, responsables des services techniques, responsables des affaires domaniales et environnementales, responsables des systèmes d’information, responsables du développement local et de la planification, responsables des affaires administratives et financières et les personnes responsables des marchés publics. Cette ressource humaine reçoit des rémunérations qui multiplient par 3 à 5, les rémunérations habituelles des cadres de la fonction publique. Ce qui constitue un investissement très important et une création d’emplois dont les titulaires peuvent être classés dans une classe moyenne sur le plan socioéconomique.

L’autre investissement dans le capital humain est l’amélioration des rémunérations de certains élus et la fixation pour d’autres dans une démarche d’uniformisation selon les catégories de communes. Ainsi, les 77 maires, les 158 adjoints aux maires, les 546 chefs d’arrondissements, les 5290 chefs de villages et de quartiers de ville et les 1815 conseillers communaux ont une rémunération fixe sans d’autres revenus provenant des fonds publics. Bien que cette harmonisation soit davantage au profit des élus des communes à statut intermédiaire et de droit commun, les élus des communes à statut particulier en gagnaient plus officiellement ou non, elle valorise la fonction de l’élu communal et améliore son statut. Des véhicules ont été mis à la disposition des 77 maires et adjoints au maires, de même que les 77 secrétaires exécutifs. Plus de 22 milliards engagés chaque année.

Enfin, comme ressources en direction des communes, le Gouvernement entrevoit le Fonds d’Investissement Communal (FIC) pour faciliter l’accès des communes au marché financier, en plus de l’amélioration des ressources propres et des transferts de l’Etat vers les entités décentralisées. Cette amélioration des ressources destinées aux communes peut permettre de franchir la barre des 100 milliards de transfert annuel de l’Etat vers les communes.

Tous ces engagements de l’Etat doit être renforcés par une série de formations modernes et orientées vers la gestion axée sur les objectifs et les résultats de développement durable.

Une réforme qui améliore la bonne gouvernance et le respect des procédures de passation des marchés publics.

La Réforme structurelle du secteur de la décentralisation, en mettant des cadres compétents à la disposition des communes contribue à assainir la gestion des ressources communales. En témoigne les nombreuses violations des procédures de passation des marchés publics dans les communes que les secrétaires exécutifs ont mis à jour et tentent de corriger avec l’aide des responsables des affaires administratives et financières et les personnes responsables des marchés publics. La visite et les témoignages recueillis dans une vingtaine de communes font état d’une amélioration substantielle des procédures de passation des marchés publics dans les communes. Ces efforts, pour le moment noyés dans les dettes colossales que certains maires ont contractées dans les règles de l’art ou non, méritent d’être soulignés. De plus, des efforts sont en cours pour améliorer la mobilisation des ressources propres. Sur ce chantier, il faut des plans stratégiques et des options que les réformes en cours dans la gestion des équipements marchands au niveau national ne facilitent pas. La nouvelle administration communale est orientée vers les résultats et devrait améliorer la fourniture des services administratifs et sociaux de base aux populations, pour que les Plans de développement communal soient réalistes et développent des synergies d’actions avec les orientations stratégiques du gouvernement. Tous les cadres déployés dans les communes, sous l’autorités des SE travaillent à changer la donne, à produire des résultats, même si leur dévouement, dans certaines communes, se heurte au faible niveau du reste du personnel, dans des administrations communales déséquilibrées et en manque de cadre d’exécution et de suivi.

 

La nécessaire adaptation des maires et des élus !

Dans un passé récent, le maire était la clé de voûte des organes de l’institution communale. Aujourd’hui, il est cantonné à un rôle politique et de supervision. Ce rôle politique, le maire doit le réinventer dans sa capacité à impacter le PDC et les outils de planification, alors qu’actuellement sur le terrain, certains maires négligent le processus d’élaboration du PDC 3 ou 4 selon les générations en cours dans les communes. Or, c’est à ce niveau que l’élu, porteur de la vision de développement de la commune devra s’imposer. La deuxième opportunité d’exercer son rôle politique concerne la procédure d’élaboration du budget communal et du Plan Annuel d’Investissement (PAI). Le budget est un puissant instrument de politique publique communale qui doit refléter la vision des élus de la commune. Le budget doit suivre une cohérence d’année en année avec le PDC, d’où la nécessité d’avoir des PDC réalistes, et intégrer les ajustements nécessaires pour atteindre les objectifs de développement de la commune. Avec les débats d’orientation budgétaire, les élus doivent bien se préparer pour impacter leur commune avec l’instrument qu’est le budget. Le maire exprime son pouvoir politique dans le bon exercice de ses compétences propres. C’est la seule fenêtre où le maire peut engranger directement des résultats et montrer l’exemple au SE. Enfin, le pouvoir politique du maire réside dans sa capacité à promouvoir une démocratie locale qui lui permet d’impliquer les citoyens dans les prises de décision, la mise en œuvre et la reddition de comptes. C’est un pan important de l’action publique communale que beaucoup de maire négligent. Or, la vraie démocratie locale légitime les politiques publiques, facilite l’adhésion et l’appropriation par les citoyens et promeut le civisme tout court et le civisme fiscal en particulier.

A la faveur de cette réforme, le maire perd des atouts essentiels à savoir les fonctions d’ordonnateur du budget, mal géré par certains maires par le passé, le pouvoir de nommer aux emplois communaux, également galvaudé par certains maires, surtout des mandatures antérieures, la signature et la représentation communale. Il peut récupérer une bonne partie de ces atouts en assumant au mieux ses fonctions politiques et en utilisant de manière optimale le conseil de supervision.

 De la bonne gestion des premiers couacs dans la cohabitation Maires-SE.

Deux catégories de SE se distinguent du lot actuellement. Les secrétaires exécutifs qui ont déjà servi dans les communes à n’importe quel poste et qui ont donc une expérience de la gestion communale et les secrétaires exécutifs disposant d’une grande culture qui ont abordé la fonction avec un esprit d’ouverture et qui se sont attelés à vite apprendre des autres cadres et des maires sans défiance et condescendance. Ces SE sans prétention de venir dans un monde où tout est mauvais et eux sont en mission de sauvetage, s’intègrent facilement dans l’administration communale et commencent par obtenir des résultats. Certains SE ont totalement raté le coach et auront du mal à remonter la pente. Bien qu’étant surprotégés, il est important que le Gouvernement soit attentif à ces limites de certains SE et facilitent leur remplacement au bout de deux ans au plus. Ce qui suppose la mise en place d’indicateurs communs de performance pour l’évaluation de tous les SE et d’indicateurs particuliers propres à chaque commune. Si les indicateurs globaux relèvent de l’Etat central, ceux propres à chaque commune relève du Conseil de Supervision qui doit donner des missions précises au SE sur la base du PDC et des défis à relever sur le plan administratif. La surveillance des SE et autres cadres par des instances de l’Etat, autres que l’autorité de tutelle n’est pas de nature à faciliter leur collaboration avec le maire et les élus de la commune et constitue une entorse à l’autonomie locale et à la libre administration des collectivités territoriales. Toute ingérence ou immixtion dans la gestion, le fonctionnement d’une commune qui ne provient pas de l’unique autorité de tutelle et donc prévue par une loi déclarée conforme à la constitution, doit être comprise comme une limite à la libre administration des communes. On peut comprendre le souci d’encadrement des SE et des cadres en début de réforme, mais il est important de renforcer les capacités des structures communales pour exercer les contrôles a priori et a posteriori et étoffer les services des préfectures pour une amélioration de l’assistance-conseil. Une attention particulière doit être réservée à l’inspection des services communaux pour jouer un rôle de contrôle et de sanction.

La nécessité de renforcer le maire dans les pouvoirs de  nomination, de signature et de représentation !

Bien que les faiblesses dénoncées au sein des administrations communales soient le fait de certains maires, force est de constater qu’on ne saurait parler de collectivités territoriales sans élus et sans maire. La création du Conseil de Supervision vient combler un tant soit peu le déséquilibre au profit du SE, chef de l’administration communale, ordonnateur du budget et détenant l’essentiel des pouvoirs de nomination et de signature. Restant dans l’esprit du Code de l’Administration Territoriale qui reconnait le maire comme la première autorité politico-administrative, certaines attributions doivent revenir au maire. Il s’agit de rendre effectif par le maire le tirage au sort et la nomination des SE, mais aussi des autres directeurs comme le prévoit déjà l’article 133 du Code de l’Administration Territoriale : « Sauf  pour  les fonctions inscrites  au  fichier  national des  principales fonctions administratives des  mairies, le secrétaire exécutif nomme aux  emplois communaux de rang de chef de service au moins, après avis de non objection du conseil de supervision ». De plus, le redéploiement général du personnel doit passer par le conseil de supervision afin de recueillir son avis de non objection. De plus, à court terme, des problèmes de collaboration peuvent surgir entre les élus et les SE si leur surprotection demeure. Il est donc nécessaire de sauter le verrou de l’article 144 alinéa 2 qui fait intervenir le préfet dans une procédure interne à la commune alors qu’en sa qualité d’autorité de tutelle, il en apprécie la légalité : « La révocation du secrétaire exécutif est décidée par  délibérations favorables du préfet d’une part  et du conseil de supervision d’autre part, prises en réunion conjointe. La date et  le  lieu  de  la réunion sont  notifiés  au  préfet, par  le  président  du  conseil  de supervision, au moins huit (08) jours avant sa tenue ». Il est important que le Conseil de supervision oriente et évalue convenablement les actions du secrétariat exécutif.

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