Sanction du maire d’Aplahoué avec possibilité d’aggravation: Barnabé Dassigli signe sa 2ème suspension de maire en moins d’un an !
(Le Conseil des Ministres pourrait révoquer Casimir Sossou cette semaine)
A la suite d’une session du Conseil Départemental de Concertation et de Coordination au cours de laquelle le maire d’Aplahoué a été auditionné, la procédure pour faute lourde a fait l’objet d’un rapport du préfet du Couffo qui a atterri sur la table du ministre Barnabé Dassigli depuis le 05 mars 2018. Après examen, le ministre de la décentralisation et de la gouvernance locale a prononcé la suspension du maire. De sources dignes de foi, le compte rendu du ministre Dassigli pourrait entraîner la chute totale du maire de la capitale du Couffo.
Telle une épée de Damoclès, la procédure pour faute lourde planait depuis sur la tête du maire d’Aplahoué. A la demande d’une majorité de conseillers, l’Inspection Générale des Finances a audité depuis 2017 la gestion du maire. Son rapport, ajouté aux éléments dont disposait l’autorité de tutelle ont tôt fait de plomber le jeune et dynamique maire d’Aplahoué.
Les éléments du dossier sont sans appel.
Il faut préciser que le maire d’Aplahoué, malgré la suspension prononcée par le ministre de la décentralisation demeure présumé innocent des fautes lourdes à sa charge. Premièrement, le maire n’a pas rendu compte au conseil communal de la prise en charge provisoire de la gestion de la gare routière d’Azovè dont les recettes, plus tard ne seront pas versées dans les caisses de la commune. Deuxièmement, le maire a perçu des frais de mission sans mettre ce voyage au profit de la commune. Troisièmement, le maire a procédé à des nominations sans respecter les procédures et sans transmettre les arrêtés à l’autorité de tutelle. Quatrièmement, la double notification, avec des montants différents du même marché avant le dépouillement des offres et le travail de la commission. Cinquièmement, le paiement d’indemnités de session à un élu dont le mandat a été invalidé par la Cour Suprême.
La constitution de la faute lourde
Plusieurs textes de loi et plusieurs décrets traitent de la question de la faute lourde. En dehors de la démission, la faute lourde est la deuxième procédure qui permet de mettre un terme au mandat du maire avant son échéance. Selon l’article 20 de la loi n°97-028 du 15 janvier 1999 portant organisation de l’administration territoriale de la République du Bénin, « …Le conseil départemental de concertation et de coordination connaît en outre des fautes lourdes reprochées aux maires et aux conseils communaux. Les délibérations du conseil départemental de concertation et de coordination donnent lieu à des recommandations aux préfets. Et c’est l’article 55 de loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin qui détermine les faits qualifiables de fautes lourdes : « Constituent des fautes lourdes, au sens de l’article ci-dessus, les faits ci-après :
– utilisation des fonds de la commune à des fins personnelles;
– prêts d’argent effectués sur les fonds de la commune ;
– faux en écritures publiques ;
– refus de signer ou de transmettre, à l’autorité de tutelle, une délibération du conseil communal ;
– vente ou aliénation abusive des biens domaniaux ;
– toutes autres violations des règles de déontologie administrative ».
Le décret n° 2001- 414 du 15 octobre 2001 fixant le cadre général du règlement intérieur du conseil communal revient également sur la notion de faute lourde en son article 55 : « Constituent des fautes lourdes, au sens de l’article ci-dessus, les faits ci-après :
– utilisation des fonds de la commune à des fins personnelles ;
– prêts d’argent effectués sur les fonds de la commune ;
– faux en écriture publiques ;
– refus de signer ou de transmettre, à l’autorité de tutelle, une délibération du conseil communal ;
– vente ou aliénation abusive des biens domaniaux ;
– toutes autres violations des règles de déontologie administrative ».
Procédure en cas de faute lourde.
A la différence de la procédure de destitution, la procédure pour faute lourde est contradictoire. La procédure la plus appropriée à l’encontre d’un maire en cas de soupçon de malversation, ou de mauvaise gestion des ressources de la commune, reste celle de la faute lourde prévue et punie par l’article 54 de la loi 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin. Cette procédure contradictoire, administrative et judiciaire est plus à même de contribuer à la manifestation de la vérité. Aux termes de l’article 54 de la loi susvisé : « Le maire ou l’adjoint qui commet une faute lourde peut être révoqué de ses fonctions. La faute lourde est constatée par l’autorité de tutelle qui après avis du conseil départemental de concertation et de coordination, créé par l’article 16 de la loi 97-028 portant organisation de l’administration territoriale en République du Bénin, en dresse rapport au ministre chargé de l’administration territoriale ». Les mêmes dispositions sont reprises dans le décret n° 2001- 414 du 15 octobre 2001 fixant le cadre général du règlement intérieur du conseil communal en son Article 54 : …La faute lourde est constatée par l’autorité de tutelle qui après avis du conseil départemental de concertation et de coordination, créé par l’article 16 de la loi 97-028 portant organisation de l’administration territoriale de la République du Bénin, en dresse rapport au ministre chargé de l’administration territoriale. Celui-ci peut prononcer la suspension du maire ou de l’adjoint et proposer le cas échéant sa révocation en conseil des ministres. Le décret N°2002-376 du 22 août 2002 portant organisation et fonctionnement de l’administration départementale apporte une petite précision en son article 47 : « En cas de faute lourde du maire ou d’un adjoint au maire telle que définie, à l’article 55 de la loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin, l’autorité de tutelle :
– prend l’avis du Conseil Départemental de Concertation et de Coordination ;
– en dresse un rapport au Ministre chargé de l’administration territoriale.
Comme on le voit, plusieurs textes abordent le sujet sans préciser la nature de l’avis du Conseil Départemental de Concertation et de Coordination.
Ce qu’encours le maire en cas de faute lourde.
En cas de faute lourde, le maire encoure deux procédures :
– une procédure administrative contradictoire qui peut conduire à sa suspension pour deux mois au maximum ou à sa révocation en conseil des ministres ;
– une procédure judiciaire dont l’issue dépend de l’appréciation du juge et des textes violés.
Selon la lettre et l’esprit de l’article 54 de la loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin : « Le maire ou l’adjoint qui commet une faute lourde peut être révoqué de ses fonctions. La faute lourde est constatée par l’autorité de tutelle qui après avis du conseil départemental de concertation et de coordination, créé par l’article 16 de la loi 97-028 portant organisation de l’administration territoriale en République du Bénin, en dresse rapport au ministre chargé de l’administration territoriale. Celui-ci peut prononcer la suspension du maire ou de l’adjoint et proposer le cas échéant la révocation au conseil des ministres ». L’article 56 de préciser : « La suspension prévue à l’article 54 ci-dessus a lieu par arrêté du ministre chargé de l’administration territoriale et la révocation par décret pris en conseil des ministres. Toute suspension d’un maire ou d’un adjoint doit être précédée d’une audition de l’intéressé par le conseil départemental de concertation et de coordination visé à l’article 54 ci-dessus ou d’une invitation à fournir des explications par écrit audit conseil. La suspension ne peut excéder deux mois. Passé ce délai, le maire ou l’adjoint suspendu est rétabli d’office dans ses fonctions ». Enfin, l’article 57 ouvre la voie à des sanctions pénales : « La sanction administrative ne fait pas obstacle aux poursuites judiciaires ».
Les voies de recours
En plus des droits à la défense, le maire visé par la procédure pour faute lourde peut saisir les juges administratif et constitutionnel. Si la saisine du juge administratif est prévue par l’article 58 de la loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin « Toutes décisions portant démission d’office, suspension ou révocation du maire ou de ses adjoints est susceptible de recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative compétente », la saisine de la cour constitutionnelle résultera de la violation d’un principe constitutionnel ou des textes de loi sur la décentralisation intégrés au bloc de constitutionnalité.
Vers une politisation de la procédure administrative et judiciaire ?
La suspension du maire de Cotonou a donné lieu à un début de soulèvement entretenu par la solidarité de certaines personnalités politiques au risque d’en faire une affaire de politique politicienne. Celle du maire d’Aplahoué, également de l’opposition ne manque pas de faire grincer des dents et de faire couler encre et salive. Mais au regard des faits que le maire aurait reconnu devant le Conseil départemental de Concertation et de Coordination, les fautes lourdes semblent véritablement constituées. Autrement, le mis en cause peut saisir le juge administratif territorialement compétent.
Encadré : l’arrêté du ministre Dassigli