Rupture An 4 : Décentralisation et gouvernance locale, de grandes enjambées vers le développement de nos communes

les fruits ont-ils tenu la promesse des fleurs ?

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Sur le front de la Décentralisation et de la Gouvernance Locale, le premier signal fort lancé par le président Patrice TALON remonte sans doute au 22 Juin 2016. A cette date, eh bien, les chefs-lieux des douze départements ont été fixés et les nouveaux préfets installés dans leurs fonctions. Cette décision s’est révélée aux yeux de nombreux Béninois comme un acte de courage politique jamais assumé depuis l’organisation en 1993 des états généraux sur l’administration territoriale. A l’heure du bilan et nous y sommes en ce moment, quelle est la mention à placer à l’actif du pouvoir actuel dans le sillage de cette décision ? Autrement dit, les fruits ont-ils tenu la promesse des fleurs ? C’est la question centrale que nous plaçons au cœur de cette émission avec comme invité, Monsieur Alassane SEIDOU, Ministre de la Décentralisation et de la Gouvernance Locale.

 Journaliste : Alassane SEIDOU a été Maire de Kandi de 2003 à 2007. Il était également précédemment Ministre de la Décentralisation. C’était de 2008 à 2011. Et donc voilà l’homme que nous recevons pour faire le bilan depuis l’avènement du régime de la rupture sur les actions qui ont été menées sur le front de la Décentralisation et de la Gouvernance Locale. Monsieur le Ministre Alassane SEIDOU, on vous a vu récemment en tournée dans plusieurs communes du Bénin. Quels ont été les objectifs ou l’objectif majeur de cette sortie ?

Ministre : Effectivement nous sommes descendus dans les communes et puis nous allons continuer par descendre dans les communes puisque nous avons prévu faire un département par mois. Nous avons commencé avec le Département du Zou ; après le Zou, nous sommes allés dans la Donga ; après la Donga, nous sommes allés dans le Couffo et après le Couffo, nous avons fait l’Atacora. Nous allons poursuivre avec le Plateau et ainsi de suite. L’objectif, c’est de rencontrer les élus locaux et les élus communaux pour échanger avec eux. C’est aussi de voir tout ce qui a pu être fait depuis 2003. Vous savez que nous sommes engagés dans cette dynamique depuis 2003. Il y a de cela 17ans. Nous voulons savoir concrètement ce qui a pu être fait. Effectivement, cette tournée s’est avérée très édifiante parce que nous avons constaté qu’il y a des communes qui ont au moins réussi à asseoir le dispositif administratif. C’est-à-dire les hôtels de ville ont été construits, les bureaux d’arrondissement, les services ont été créés au niveau de l’administration communale. Et au niveau des arrondissements aussi nous avons vu des arrondissements qui ont pu créer toutes les commodités possibles pour que les services soient fournis aux populations.

Par contre, nous avons aussi vu des communes dans lesquelles jusqu’à ce jour, aucun bureau d’arrondissement n’est construit. Il faut vraiment descendre pour croire. Aucun bureau d’arrondissement n’est construit après 17 ans de Décentralisation.

Et comment cela peut-il s’expliquer selon vous ?

Mais ce n’est pas acceptable. Donc nous avons été obligés de donner des instructions aux préfets par rapport à ces communes pour qu’avant d’approuver les budgets à venir de ces communes-là, ils doivent s’assurer qu’elles ont prévu la construction des bureaux d’arrondissements parce que si vous voyez tout ce qui est en train d’être fait par le gouvernement au niveau central  par rapport à l’état civil, si on sait que tout part du bureau d’arrondissement, on ne peut pas admettre que jusqu’à ce jour, il y ait encore des arrondissements sans bureaux. C’est dire que c’est une tournée qui est pertinente. Elle nous a permis d’apprécier le fonctionnement des administrations communales, le fonctionnement des organes de prise de décision, notamment le Conseil communal, le Conseil d’arrondissement, les conseils de villages ou de quartiers de villes. Elle nous a permis aussi de savoir de quelle manière la population est associée à la prise des décisions parce que le premier objectif de la Décentralisation, c’est de créer au niveau de la commune un espace de démocratie participative, un espace de démocratie inclusive. Il faut que toutes les tranches de la population soient associées à la prise de décision.

Tout à fait, on imagine, plusieurs autres questions ont été recensées au cours de cette tournée. Nous allons les évoquer tout au long de cet entretien, mais déjà, on l’avait dit, le gouvernement a rendu opérationnel les douze départements en matière de déconcentration. Quels sont les signes extérieurs aujourd’hui visibles dans les chefs-lieux qui montrent que le gouvernement avait raison d’agir ainsi qu’il l’avait fait.

Permettez-moi de commencer par la genèse même de la décision. C’est la loi 97-028 du 15 janvier 1999 qui a consacré le découpage de notre pays en douze départements notamment en son article 6. Et à l’article 8, la même loi a précisé que les chefs-lieux seront désignés par décret pris en conseil des Ministres. Et les critères de désignation ont été donnés. Il faut que ce soit la commune la plus autocentrée, la commune la plus développée économiquement, qui a le plus grand poids démographique et qui a le plus grand nombre de services administratifs. C’est cette commune là qu’il faut désigner comme chef-lieu. Mais la décision a duré près de deux décennies. Aucun gouvernement n’a pu prendre la décision. Quand le Président Talon est arrivé avec son leadership, il a réussi à prendre cette décision. On a pu désigner les chefs-lieux des Six nouveaux départements et aujourd’hui, ces préfectures sont opérationnelles. Ça c’est grâce au leadership du chef de l’Etat.

Maintenant les implications…

Les implications sont énormes. D’abord, je crois que c’est le plus grand obstacle qui a été levé sur le chemin de la déconcentration parce que l’objectif de la déconcentration c’est de rapprocher l’administration des administrés.

Lorsque vous considérez les départements du nord, c’est la distance qui pose problème. Et au sud, c’est le poids démographique. Avant cette décision, le citoyen de Karimama qui veut faire sa carte d’identité doit envoyer ses dossiers à Parakou à trois-cents et quelques kilomètres. Trois-cents et quelques kilomètres pour faire une carte d’identité. La carte d’identité pourrait prendre trois mois, parfois même plus. Mais aujourd’hui, cette carte se fait à Kandi ; à Kandi où d’abord le préfet est moins chargé parce qu’avant la mise en œuvre de cette décision, le seul préfet s’occupe du Borgou et de l’Alibori. Ça fait quatorze communes. Du côté de l’Atacora, le seul préfet s’occupait de treize communes.

Au sud, le problème de distance ne se pose pas. Mais le problème du Sud, c’est la densité de la population. Si vous allez aujourd’hui à la préfecture de Cotonou voire l’affluence de la population à cause de la carte d’identité, vous allez donner raison au gouvernement. Pourtant, la décision a été prise et il y a une seconde préfecture à Allada, la préfecture de l’Atlantique. Les deux étaient à Cotonou. Alors comment ça se passait quand il n’y avait pas la mise en œuvre de cette décision ? Donc c’est ça le problème. C’est de servir les populations, de soulager les populations en rapprochant l’administration de l’administré.

Les autres conséquences indirectes ? Tout à l’heure, j’ai dit que c’est le plus grand obstacle qui a été levé sur le chemin de la déconcentration. Aujourd’hui, avec la création des six nouveaux chefs-lieux de départements, des six nouvelles préfectures, tous les services, tous les ministères sectoriels ont commencé par installer leur direction départementale dans ces départements. Ce qui n’était pas possible avant l’installation de la préfecture.

Qu’est-ce qui a bloqué la désignation alors des chefs-lieux depuis tout ce temps, depuis plusieurs décennies selon vous ?

Vous savez, c’est là que le leadership joue. Cette décision a été prise mais beaucoup de choses ont été faites en amont. C’est une décision qui a été bien préparée. Et vous avez constaté que le peuple béninois l’a accepté sans bruit. Personne n’aurait cru qu’on pouvait prendre cette décision sans remous. Mais la décision a été prise parce qu’il y a eu une bonne préparation en amont. C’est ça le leadership. C’est ce qui n’était pas fait si non, des gouvernements ont tenté. Mais quand il y a eu soulèvement des populations, eh bien, ils se sont rétractés. Ils ont reculé !

                                                                                                                                           A Suivre…

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