Conférence annuelle du Partenariat stratégique Association Internationale des Maires Francophones et l’Union européenne: Les pistes d’actions de l’AIMF pour « Bâtir des coalitions au service du développement local»
La ville de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso a abrité du 22-23 février 2018, la Conférence annuelle du Partenariat stratégique Association Internationale des Maires Francophones et l’Union européenne autour du thème « Bâtir des coalitions au service du développement local». Une occasion pour les maires, élus locaux, cadres des administrations locales, professionnels des médias et experts d’évaluer le chemin parcouru et de prendre des résolutions pour l’avenir. Le Réseau des Journalistes pour le Développement local et urbain, la Démocratie locale et la Décentralisation (RJ3D) a été lancé à cette occasion avec de grandes ambitions pour la communauté AIMF.
En plus des cinq groupes de plaidoyer mis en place dans le cadre du partenariat stratégique entre l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF) et la Commission Européenne: « finances locales », « statut de l’élu local et fonction publique territoriale », « services essentiels », « rôle des Autorités locales face au changement climatique» et « localisation des Objectifs de Développement Durable », le Réseau des médias a été lancé à Ouagadougou afin de permettre une meilleure prise en compte des problématiques liées à la décentralisation et au développement local dans les médias.
Le RJ3D, réseau international des journalistes francophones spécialisés dans la décentralisation lancé
Le Réseau des journalistes spécialisés dans le développement local et urbain, la démocratie locale et la décentralisation (RJ3D) a été lancé par l’Association internationale des maires francophones (AIMF) le 22 février 2018 dans la capitale burkinabé. Objectif, œuvrer à renforcer l’intérêt des médias et des journalistes pour la décentralisation et le développement local.
Sont intervenus à l’occasion de cet atelier qui a débuté les travaux de Ouagadougou, pour édifier les participants, le journaliste et écrivain nigérien, Seidik Abba, et le président du Réseau des médias pour la décentralisation de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine), le Béninois Franck S. Kinninvo. Le professeur Laurent-Charles Boyomo Assala a terminé le bal des interventions.
Dans la droite ligne des conclusions de Montréal sur la création du Réseau, les intervenants ont rappelé le chemin parcouru. La mise en place d’un réseau des journalistes spécialisés sur la décentralisation afin de les mobiliser autour des problématiques et de favoriser les échanges à l’échelle nationale, sous-régionale et internationale a été l’une des recommandations forte de Montréal, a rappelé Seidik Abba. Ce Réseau s’appuiera sur une page Facebook, afin d’assurer la présence du réseau des journalistes sur les réseaux sociaux, faciliter la diffusion des informations et les passerelles avec les collectivités locales qui utilisent de plus en plus ce type de média pour communiquer. Le Réseau animera des activités comme :
- La publication chaque année, sous l’égide de l’AIMF, des recueils des meilleurs articles sur la décentralisation, la remise d’un prix au meilleur article ;
- L’organisation d’activités de renforcement des capacités des journalistes sur les problématiques locales, les enjeux urbains et la décentralisation ;
- L’instauration des rencontres plus régulières entre d’une part journalistes et élus locaux et d’autre part entre organisations d’élus locaux et organisations professionnelles des journalistes ;
- L’organisation des voyages de presse pour permettre aux journalistes de mieux appréhender les problématiques urbaines et les enjeux locaux.
Pour Franck S. KINNINVO, le succès de ce Réseau dépendra des journalistes mais également des autorités locales qui doivent faciliter l’accès aux informations tout en facilitant les investigations journalistiques. « Les enjeux du monde se déplacent des Etats et des gouvernements centraux vers les collectivités locales. C’est donc par anticipation que le journalisme se réinventera dans l’investigation locale et l’intérêt pour les problématiques de développement à la base ». Pour le président du Réseau des médias pour la décentralisation de l’UEMOA, les autorités locales doivent s’engager aux côtés du RJ3D à travers les services de presse, d’information et de communication des collectivités locales.
Pour l’AIMF, les engagements du RJ3D doivent couvrir les spécialisations des journalistes aux questions de décentralisation. Voilà pourquoi, le professeur Laurent-Charles Boyomo Assala, Directeur de l’École supérieure des sciences et techniques de l’information et de communication (ESSTIC) du Cameroun a été invité à la rencontre afin de proposer des modules de formation aux journalistes qui souhaitent se spécialiser dans la décentralisation. L’universitaire camerounais s’est réjoui de cette démarche de l’AIMF avant de présenter les offres disponibles à l’ESSTIC pour former les journalistes sur des questions de développement durable, de la démocratie locale et aux enjeux urbains.
Les acteurs locaux présents à Ouagadougou ont reconnu que le rapprochement entre professionnels des médias et élus locaux, soutenu et encouragé par l’AIMF, va permettre de renforcer la gouvernance et la démocratie locales. Surtout dans le contexte actuel où les villes et les communes ont un rôle décisif à jouer, notamment, dans les enjeux liés au changement climatique et à la menace terroriste. Dans un continent où les élus locaux sont visiblement appelés à préparer des plaidoyers afin de faire prendre en considération leurs difficultés au quotidien, les intervenants du jour ont à l’unanimité reconnu que le RJ3D arrive à point nommé. «Les journalistes ont un rôle essentiel pour épauler les maires afin que leurs problématiques avancent et que leur autonomisation gagne en puissance», a renchéri Pierre Baillet. Et pour conclure, le secrétaire permanent de l’AIMF a promis aux futurs membres du RJ3D un apport, en termes de formation et d’information. Le prix 2018 du meilleur article a été finalisé et sera lancé sous peu afin de motiver les journalistes qui ont fait le pari d’accompagner la décentralisation.
Les collectivités locales francophones à l’avant-garde de la lutte contre le dérèglement climatique.
L’atelier de travail du groupe de plaidoyer « l’élu local face au changement climatique » a permis d’échanger les projets et pratiques pilotes de plusieurs collectivités locales. Monsieur Paul Amichia a notamment présenté le concept d’économie circulaire appliqué au district de Yamoussoukro et Mme Eddy Adjua la situation de la commune d’Abengourou. Monsieur Ndiouga Sakho a ensuite livré l’expérience de la ville de Dakar dans la mise en œuvre de son Plan Climat Energie Territorial. Monsieur Antoine Faye a enfin clôturé les présentations en soulignant les échéances par lesquelles il faudra encore passer pour aboutir à un plaidoyer supranational finalisé, et à sa diffusion par les canaux les plus pertinents et les plus efficaces.
Quelques recommandations qui ont été prises à l’issue des travaux :
- Vis-à-vis de l’AIMF :
- Renforcer la sensibilisation et les compétences techniques des élus sur les enjeux des changements climatiques ;
- Renforcer l’appui aux collectivités locales dans la mise en œuvre de leurs études de faisabilité et de leurs projets ;
- Appuyer la mise en place d’une plateforme organisée autour de la mairie de Dakar, afin de faciliter le partage d’expériences, notamment sur son Plan Climat Energie Territorial et son réseau de partenaires.
- Vis-à-vis des Autorités centrales :
- Rendre obligatoire pour les collectivités des documents de planification qui intègrent un volet climat et durabilité ;
- Responsabiliser d’avantage les collectivités au niveau de la gestion des ressources, de la gestion des déchets, notamment en milieu rural, et de la gestion de la fertilité des sols ;
- Territorialiser la mise en œuvre des Contributions Déterminées au Niveau national.
- Vis-à-vis des Maires :
- Respecter l’engagement pris à Yamoussoukro en allouant 1% du budget de leur collectivité au Fonds Climat Territoire ;
- Prévoir une ligne budgétaire consacrée au renforcement de capacités et aux études ;
- Intervenir dans les systèmes de collecte et de production des statistiques locales et favoriser l’utilisation des SIG (pour la gestion des déchets, la gestion forestière et de la fertilité des sols, ainsi que l’identification des zones à risque).
Plaidoyer pour les services essentiels.
L’atelier du groupe de plaidoyer pour les « services essentiels » a mis l’accent sur l’eau potable-Assainissement – Gestion des déchets. Il a travaillé à
- Amender, compléter et valider les éléments constitutifs du plaidoyer supranational, document destiné à appuyer les démarches de plaidoyer au niveau de chaque pays, au niveau sous régional et au niveau mondial ;
- Identifier pour chaque groupe pays, les cibles et les acteurs susceptibles de mettre en œuvre les plans d’actions ;
- Définir le mode d’organisation et le plan d’actions à mettre en œuvre.
A l’issue des travaux, riches en discussion et débat, le groupe de plaidoyer « services essentiels » a émis les recommandations suivantes :
Concernant le plaidoyer supranational
Le groupe plaidoyer « Services essentiels » préconise de retenir neuf axes qui sont communs aux pays et aux trois secteurs des services essentiels :
- Améliorer le cadre juridique et institutionnel des compétences des autorités locales relatives aux « services essentiels » et les associer dans la définition des réformes.
- Définir des mécanismes nationaux d’amélioration de la coordination des actions entre les autorités locales, l’Etat et toutes les autres parties prenantes.
- Promouvoir l’accès des autorités locales aux financements.
- Renforcer les capacités techniques des autorités locales pour une prise en charge efficace de leur mission de Maîtrise d’Ouvrage.
- Poursuivre l’effort d’appui à l’élaboration des documents de planification relatifs au développement des « services essentiels ». Dans ce cadre un accent particulier a été mis sur la nécessité de renforcer la collecte des données homologuées sur les services essentiels par les personnes assermentées.
- Favoriser la mise en place de réflexions ou de dynamiques à l’échelle intercommunale, pour accroitre la pertinence et l’efficience de l’action communale.
- Améliorer le niveau d’équipement en infrastructures et assurer durablement la continuité des services.
- Développer la gouvernance citoyenne avec l’appui des Organisations de la Société Civile.
- Capitaliser les expériences et promouvoir les échanges des bonnes pratiques entre les autorités locales tant sur un plan intercommunal, national ou supranational.
Concernant la diffusion du plaidoyer supranational
– Sur le plan de l’organisation, le groupe plaidoyer « Services essentiels » préconise :
- Le portage du plaidoyer supranational par les faitières au niveau de chaque pays
- La désignation d’un élu membre de la faitière comme ambassadeur pays du plaidoyer supranational là ou ce n’est pas encore le cas.
- La désignation dans chaque pays d’un point focal technique « services essentiels »
- Sur le plan des actions à mettre en œuvre pour une large diffusion du plaidoyer : le groupe plaidoyer « Services essentiels » préconise de :
- Mettre en place des coalitions avec les parlementaires et leur réseau au niveau national et les réseaux des journalistes notamment le RJ3D.
- Publier le document de plaidoyer supranational en prenant le soin de le traduire en anglais et en langues locales si nécessaire pour toucher les organisations internationales mais également les populations locales.
- 0rganiser au sein des faitières, dans chaque pays, un atelier de restitution du document de plaidoyer supranational avec les parties prenantes.
- Organiser, au sein de chaque groupe pays, un atelier de restitution du plaidoyer supranational auprès des partenaires techniques et financiers puis dans un deuxième temps organiser une réunion supranationale, avec l’appui de l’AIMF.
- Elaborer des outils de communication pour une large diffusion du plaidoyer supranational en rapport avec le réseau des journalistes.
La question du statut de l’élu local et la fonction publique territoriale à l’ordre du jour.
L’atelier n° 5 portant sur le thème « Les avancées du plaidoyer sur le statut de l’élu local et la fonction publique territoriale s’est tenu à l’hôtel Palace le vendredi 23 février 2018. Il a été présidé par M. Souleymane Koné, Président du Conseil régional du Kabadougou, deuxième contrôleur de l’ARDCI, représentant les présidents du groupe, assisté de Monsieur Flavien SASSE, Assistant Technique International auprès de l’Association Nationale des Communes de Guinée.
La séance aura permis aux participants de s’édifier des expériences des différents pays. Ce qui a permis d’enrichir le document de plaidoyer par de nouveaux apports constructifs. Ainsi, l’intervention du Préfet Charles Yao Kouassi, coordinateur scientifique du groupe, qui a mis en évidence :
- les principales reformes concernant la Fonction Publique Territoriale avec un accent sur les évolutions observées au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire ;
- les avancées notées au niveau de l’adoption du statut des élus locaux au Cameroun, en Côte d’Ivoire et au Sénégal ;
- les institutions et les actions de promotion du statut de l’élu local et de la Fonction Publique Territoriale au Sénégal et en Côte d’Ivoire;
- les principaux enjeux au nombre de trois à savoir : l’adoption d’un statut de l’élu local, la généralisation de la Fonction Publique Territoriale et le renforcement des capacités des Elus locaux et du personnel des Collectivités Locales ;
- les recommandations en direction des autorités centrales, des parlementaires, des élus locaux et leurs faîtières, des agents de la presse et la société civile, des partenaires au développement.
La présentation de l’avant-projet de loi portant statut de l’élu local en Côte d’Ivoire, par Monsieur GOGONE-BI BOTTY MAXIME, Directeur de la Tutelle Administrative (MIS-RCI) qui a mis aux participants de débattre des points importants comme la qualité d’élu local, les déclarations de patrimoine et d’intérêts, les attributs de fonction, la formation des élus locaux, l’exercice du mandat, les indemnités et avantages matériels de l’élu local, les responsabilités et protection de l’élu local, l’honorariat et la fin du mandat de l’élu local. Dans la même dynamique, Madame Titi Léocadie Coumoue, Sous – Directrice de la Gestion du Personnel de la DGDDL a présenté le projet de loi sur la Fonction publique territoriale en cours d’adoption en Côte d’Ivoire. Après un bref rappel du contexte de la Fonction Publique Territoriale en Côte d’Ivoire (statut juridique du personnel des collectivités territoriales, rémunération et avantages sociaux, recrutement et profil de carrière du personnel des Collectivités Territoriales), Madame la Sous-Directrice a présenté dans ses grandes lignes l’avant-projet de loi portant statut de la Fonction Publique Territoriale qui s’articule autour des points suivants : la qualité de fonctionnaire territorial, le statut des agents des Collectivités Territoriales et les conditions d’accès à la Fonction Publique Territoriale, les droits et devoirs des fonctionnaires des Collectivités Territoriales, la rémunération et les avantages sociaux, la discipline, les positions administratives, la mobilité, l’évaluation, l’avancement et la promotion interne, les organes de la Fonction Publique Territoriale et la cessation des fonctions.
Après de riches débats, les participants ont formulé des recommandations. Il s’agit d’œuvrer afin de proposer un statut de l’élu local précisant outre les devoirs, des droits protecteurs des élus locaux et de l’intérêt général ainsi que des garanties sociales, juridiques et des rémunérations plus attrayantes à la hauteur des charges qui leur incombent et de faire adopter dans tous les Etats un statut de la Fonction Publique Territoriale qui garantit les droits et avantages fondamentaux du personnel des collectivités territoriales, notamment la stabilité de l’emploi, la mobilité, un bon niveau de rémunération, une protection juridique et sociale.
Cet atelier a également recommandé que les Associations nationales travaillent à
- Améliorer la gouvernance des collectivités territoriales (proscrire les détournements, les actes de gestion de fait, la corruption, les surfacturations etc.) pour améliorer l’image des collectivités territoriales ;
- S’impliquer davantage dans les actions de plaidoyer auprès du gouvernement central et diversifier les initiatives, notamment en direction des parlementaires, la presse et la société civile ;
- Inscrire le renforcement des capacités des élus locaux et du personnel comme des priorités de développement.